Le café est l’une des exportations agricoles les plus importantes de l’Ouganda, mais la multiplication des sécheresses, des parasites et des maladies liée au changement climatique a considérablement réduit son rendement et sa valeur. Cet article explore les stratégies et les outils adoptés par les producteurs/productrices de café ougandais pour renforcer leur résilience au changement climatique.
Le café est un élément essentiel de l’économie ougandaise. La valeur des exportations d’arabica et de robusta est estimée à 859 millions de dollars et permet à des millions de personnes de subvenir à leurs besoins. Pour accélérer la contribution de cette culture à l’économie nationale, le pays vise à augmenter la production annuelle de café à 20 millions de sacs de 60 kilogrammes d’ici 2030, contre 8,1 millions en 2023.
Toutefois, le secteur agricole ougandais, et notamment le secteur du café, sont gravement menacés par le changement climatique qui se traduit par des conditions météorologiques imprévisibles, une hausse des températures et une augmentation des problèmes liés aux nuisibles.
L’Ouganda a connu une hausse des températures d’environ 1,3°C au cours du siècle dernier, et les plants de café, en particulier les variétés d’arabica, sont sensibles aux changements de température. Le pays souffre désormais de sécheresses plus fréquentes et de précipitations irrégulières. Les précipitations annuelles en Ouganda ont diminué d’environ 5 % au cours des 30 dernières années, ce qui a eu un impact considérable sur le rendement et la qualité du café. La sécheresse a causé une réduction de la qualité des trois principales catégories de café ougandais – Screen 18 (grains les plus gros) ; Screen 15 (grains de taille moyenne) et Screen 12 (grains les plus petits), réduisant ainsi considérablement la valeur des devises étrangères provenant des exportations de café.
Entre les températures plus chaudes et les niveaux d’humidité plus élevés les parasites et les maladies se sont multipliés dans les champs de café. La rouille des feuilles et le scolyte du caféier sont deux menaces majeures, la rouille réduisant à elle seule les rendements jusqu’à 30 % dans certaines régions.
On estime que le changement climatique réduira de 20 % les zones propices à la culture du café arabica et de 9 % celles du café robusta d’ici à 2050. Il est également possible que les zones propices à la culture du café arabica se déplacent vers les hauts plateaux, ce qui risquerait d’empiéter sur les zones naturelles protégées. En outre, le changement climatique a compromis les efforts déployés par le gouvernement pour accroître les superficies cultivées pour la production de café, car les sécheresses réduisent le taux de germination des jeunes plants de café.
Ces risques liés au climat sont très préoccupants pour l’approvisionnement futur en café, culture stratégique de l’Ouganda, qui repose en premier lieu sur les épaules des agriculteurs et agricultrices. Cela signifie que les caféiculteurs/caféicultrices ougandais(es) sont en première ligne pour s’adapter à ces défis.
Comment les caféiculteurs/caféicultrices ougandais(es) se sont adaptés au changement climatique ?
Les agriculteurs et agricultrices ne dorment plus quand ils constatent les effets du changement climatique sur leurs cultures rémunératrices. Ils et elles ont donc adopté plusieurs stratégies pour s’adapter.
- Agroforesterie diversifiée dans la culture du café : Beaucoup d’agriculteurs/agricultrices en Ouganda intègrent le café à d’autres arbres et cultures pour renforcer la résilience. Par exemple, l’utilisation d’arbres d’ombrage, tels que Grevillea robusta et des espèces indigènes, contribue à modérer les températures et à améliorer la fertilité des sols. Une étude du Centre mondial d’agroforesterie montre que celles et ceux qui ont adopté des pratiques agroforestières ont signalé une augmentation de 25 % des rendements de café.
- Variétés résistantes au climat : Les agriculteurs/agricultrices adoptent de plus en plus des variétés de café robusta qui résistent mieux aux fluctuations de température et aux maladies. Les chercheurs et chercheuses de l’Institut national de recherche sur le café en Ouganda ont mis au point de nouvelles variétés de café résistantes à la sécheresse qui ont été introduites par les agriculteurs/agricultrices dans le cadre d’un programme gouvernemental de distribution de semences pour contrer les chocs de la sécheresse. Toutefois, le taux d’adoption reste faible, puisqu’il n’est que de 9 %. L’adoption de ces variétés ne se limite pas aux cultures commerciales comme le café. Les agriculteurs/agricultrices adoptent des variétés résistantes au climat pour toute un éventail de cultures, notamment le maïs, les haricots, le manioc et le millet, afin d’atténuer les effets du changement climatique sur la sécurité alimentaire.
- Face à l’irrégularité des précipitations, les agriculteurs/agricultrices ont adopté des pratiques de gestion de l’eau dans les plantations de café. Les techniques telles que la collecte des eaux de pluie et l’irrigation au goutte-à-goutte gagnent du terrain. Les agriculteurs/agricultrices ont adopté l’irrigation au goutte-à-goutte pour obtenir de meilleurs rendements de café même pendant les périodes de sécheresse. Cependant, l’utilisation de l’irrigation dans le secteur agricole en général reste limitée – moins de 1 % des agriculteurs/agricultrices pratiquent l’irrigation en Ouganda. Des pratiques de conservation des sols, telles que les cultures de couverture, le compostage et la construction de terrasses, sont mises en œuvre pour lutter contre la dégradation des sols. Dans des régions comme Kabale et Kisoro, les techniques de conservation des sols ont permis d’augmenter de 15 % les rendements de café et d’améliorer la santé des sols.
- Diversification des sources d’approvisionnement pour les exportations de café : Pour atténuer les risques liés à la baisse de la production et répondre à la demande mondiale, le gouvernement a étendu la production de café à une région où il n’y est pas cultivé traditionnellement, à savoir le nord de l’Ouganda. Cette approche a permis de répartir les risques liés aux impacts climatiques localisés. La production de café est encouragée dans le nord du pays pour compenser les pertes des régions de culture traditionnelles du sud-ouest. Les petits exploitants de ces régions reçoivent un soutien ciblé en termes de plants, de conseils techniques et d’informations, ce qui leur a permis de contribuer aux statistiques nationales sur le café.
Comme nous pouvons le constater, le secteur du café en Ouganda, un pilier économique crucial avec une valeur d’exportation de 859 millions de dollars, est confronté à des risques majeurs de sécheresse, de parasites et de maladies qui ont considérablement réduit le rendement et la qualité du café, et ont compromis les programmes de distribution de plants d’intrants. En réponse, les agriculteurs et agricultrices ougandais(e) mettent en œuvre diverses stratégies, telles que l’agroforesterie, le recours à des variétés de cultures résistantes au climat, à des pratiques de gestion de l’eau et à des techniques de conservation des sols, afin d’atténuer les risques liés au changement climatique qui pèsent sur leurs cultures.
Cependant, bien que ces stratégies marquent un progrès significatif, des doutes subsistent quant à leur capacité à protéger pleinement le secteur caféier ougandais des effets de plus en plus marqués du changement climatique, étant donné le faible taux d’adoption de ces stratégies par les agriculteurs/agricultrices. Des efforts globaux et à grande échelle sont nécessaires pour assurer la viabilité à long terme de ce secteur vital.