Science, finance et innovation

Comment la numérisation soutient le développement durable

7 min

by

Shivam Gupta

Ce blog fait partie d’une série organisée en marge de la 19ème conférence mondiale sur le développement.

Les technologies numériques peuvent considérablement contribuer au développement durable. Cet article, vainqueur du concours international de blogs jeunesse organisé par GDN et ses partenaires en 2019, décrit cinq domaines importants dans lesquels la numérisation améliore la vie des individus.

La numérisation joue un rôle capital dans le développement durable et a un impact majeur sur la vie des gens. Pour accélérer les progrès vers la réalisation des 17 objectifs de développement durable (ODD) établis en 2015, il est essentiel d’exploiter pleinement le potentiel de la numérisation, via une coopération numérique active et des échanges entre chercheurs et décideurs. Face aux défis mondiaux, nos approches devraient continuer d’évoluer, de la même façon que changent nos terres agricoles, nos écosystèmes et nos espaces urbains.

Dans ce qui suit, je décris diverses approches numériques scientifiquement étayées qui aident et peuvent aider à intensifier les efforts en matière de développement durable. La recherche que je présente ici est résumée sous forme de cinq approches expliquant comment la numérisation peut renforcer la coopération entre de multiples acteurs pour le bien du développement durable.

Numérisation, santé et qualité de l’environnement

Selon la « pyramide des besoins » de Maslow, la santé et la sécurité sont des besoins humains fondamentaux. La numérisation aide considérablement à répondre à ces besoins. Par exemple, les solutions de santé en ligne telles que « mhealth » et les diagnostics à distance utilisant les services de télémédecine ont considérablement contribué à améliorer l’accès aux établissements de santé, à réduire la mortalité néonatale et à améliorer la couverture en matière de santé.

Les nouvelles méthodes numériques, ainsi que l’intelligence artificielle et les systèmes d’information médicale intelligents, ont également ouvert la voie à des services novateurs de soins prédictifs et de médecine personnalisée afin d’assurer à tous un avenir sain et sûr.

La numérisation facilite également le suivi du climat urbain, de la pollution sonore et atmosphérique afin d’améliorer la santé environnementale. Des applications telles que Breezometer et Luftdaten fournissent des informations en temps quasi réel sur la qualité de l’air en milieu urbain, ce qui permet aux citoyens de prendre conscience de l’environnement dans lequel ils vivent.

Coopération numérique et inclusion de multiples acteurs

Le rapport du Groupe consultatif du Secrétaire général de l’ONU sur la coopération numérique recommande une vaste alliance multipartite et des plateformes permettant le partage de solutions et de services numériques afin de réaliser les ODD. Il propose de rassembler toutes les voix provenant de tous les segments de population – y compris celles des citoyens et des groupes marginalisés – au-delà de celles de l’industrie numérique.

Conformément aux recommandations de ce rapport, je voudrais souligner le concept de l’Open City Toolkit (OCT), un ensemble d’outils, de processus, de spécifications, de jeux de données et de directives permettant à de multiples intervenants – chercheurs, organisations privées, citoyens et décideurs – de recourir aux services basés sur l’open data.

Encourager les pratiques et les politiques liées à l’open data contribuerait au développement stratégique, à la création d’un consensus et à une meilleure utilisation des différents types de données. De tels usages peuvent également renforcer une coopération numérique pratique tout en favorisant la transparence, en offrant la possibilité de tester de nouvelles idées, en assurant l’égalité et la participation, ce qui contribue à la réalisation de divers objectifs de développement durable.

Le rôle des villes dans la résolution des problèmes mondiaux

Aujourd’hui, les établissements humains les plus répandus sont les villes. Plus de la moitié de la population mondiale vit déjà dans des zones urbaines et la proportion augmentera encore d’ici 2050. L’afflux d’un grand nombre de personnes met les villes en première ligne face aux menaces mondiales majeures : la pollution atmosphérique croissante, la pollution sonore, l’inégalité des ressources et les conséquences des îlots de chaleur urbains.

Par conséquent, pour un développement durable concret, il serait plus avantageux de chercher à résoudre les problèmes au niveau urbain que de se focaliser sur le niveau national. Comme indiqué dans les travaux sur l’évaluation de la durabilité des villes, chaque agglomération a tendance, en fonction de ses liens avec le développement national, à avoir des exigences différentes. Les autorités municipales doivent donc disposer de données à l’échelle locale plutôt que nationale.

L’évaluation de la durabilité des villes, en plus de l’OCT, pourrait apparaître comme une nouvelle architecture numérique adaptée à leurs objectifs particuliers. Les données et les outils générés à l’échelle de la ville (tels que les applications et les services) dans l’OCT peuvent servir de base aux réflexions des chercheurs et des décideurs. De telles approches seront d’autant plus bénéfiques qu’elles créeront un lien fort entre la recherche, la communauté citadine et la politique, puisqu’elle tiendront compte des caractéristiques uniques de chaque ville : sa démographie et les besoins des communautés marginalisées.

Par exemple, la pollution atmosphérique n’est pas un problème partout, et les causes de la pollution peuvent varier d’une ville à l’autre. Ainsi, il serait efficace de développer des solutions qui prennent en compte les données locales afin de déceler les obstacles spécifiques à chaque ville, favorisant ainsi la consommation durable et les plans d’action pour le développement durable.

Citoyens solidaires pour le développement durable

Le rapport du forum politique de haut niveau sur le développement durable des Nations Unies affirme que l’engagement communautaire est essentiel pour renforcer l’action en faveur du climat et atteindre les ODD. L’engagement citoyen permet d’améliorer la planification et la gouvernance et de mobiliser divers acteurs sociaux en faveur du développement durable.

Les outils tels que l’OCT peuvent également servir de dispositifs d’engagement communautaire. Étant donné que le concept de base de l’OCT repose sur les données ouvertes (open data), il fait office de plateforme pour l’organisation de la collecte et l’extraction de données pour toutes sortes de parties prenantes. Cette plateforme peut favoriser la coopération entre les citoyens en proposant non seulement des discussions, mais également des informations concrètes sur les ODD.

Par exemple, les citoyens, les chercheurs et les municipalités peuvent collecter des données sur la qualité de l’air et les stocker dans l’OCT. Elles peuvent ensuite être utilisées par les chercheurs pour la modélisation, par les municipalités pour leurs plans d’action et par les citoyens pour la sensibilisation. De telles pratiques peuvent rassembler les gens, améliorer les discussions concrètes et promouvoir la durabilité de l’environnement.

Le big et l’open data pour une planification et une participation optimales

La coopération numérique sur des plateformes telles que l’OCT peut aider à créer un espace commun de données, qui pourrait servir à trouver des solutions basées sur l’analyse du big data afin de soutenir la planification et l’optimisation urbaines. Ces espaces communs réduisent également la charge de travail liée à la demande de données en rendant les données fiables accessibles à tous.

Mais le regroupement de ces sources de données pose également un problème en termes de ressources et d’infrastructures nécessaires au développement durable. Par exemple, pour modéliser la pollution de l’air, nous avons besoin d’une grande quantité de données provenant de plusieurs organisations. La question est donc de savoir comment gérer cela.

La réponse à certains aspects de cette question se trouve dans mes recherches, pour lesquelles nous avons utilisé l’open data afin d’identifier le nombre requis de sources de données ainsi que leur nombre et emplacement optimaux pour la surveillance de la qualité de l’air. Les données locales aident à déterminer les variables essentielles pour une ville spécifique, réduisant ainsi la charge de données et de traitements sur l’ensemble du système.

En collaboration avec mes collègues, j’ai également mis au point des méthodes qui peuvent aider à rassembler les données requises et à exploiter au mieux les efforts de participation citoyenne. Ces méthodes, scientifiquement étayées, nous aident à surveiller et à évaluer les besoins en ressources et les plans d’action, avec la participation des citoyens et dans le respect des besoins des ODD en matière de consommation responsable des ressources.

En conclusion, la numérisation peut nous aider à relever les défis sans précédent auxquels notre génération est confrontée (changement climatique, environnement malsain et inégalités croissantes, par exemple) et à améliorer nos vies pour un avenir sûr et durable.

 

Shivam Gupta
Researcher at the Bonn Alliance for Sustainability Research/ Innovation Campus Bonn (ICB)