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Creuser plus profond : inclusion financière et objectifs de développement durable

7 min

by

Sibahle Siphokazi Magadla

Ce blog fait partie d’une série organisée en marge de la 19ème conférence mondiale sur le développement.

Quel est le lien entre inclusion financière et développement durable ? Et comment la recherche et les technologies numériques peuvent-elles contribuer à améliorer la vie des gens grâce à la microfinance et à d’autres services financiers ? Cet article – publié dans le cadre du concours international de blogs de jeunesse 2019 de GDN – analyse comment l’inclusion financière peut contribuer à faire progresser les objectifs de développement durable.

Avec l’appel à l’action « Zéro Exclusion, Zéro Carbone, Zéro Pauvreté » lors des discussions sur les objectifs de développement durable (ODD), le rôle de l’inclusion financière (en particulier de la microfinance) a pris de l’importance. L’accès aux outils financiers pour tous peut véritablement changer la donne dans tous les aspects du développement mondial.

Une étude récente montre comment l’inclusion financière peut améliorer la préparation à la réalisation des ODD d’ici 2030. En fournissant aux plus pauvres les services financiers dont ils ont besoin pour investir et gérer les dépenses imprévues, l’inclusion financière peut aider à répondre à l’ODD 1 : Pas de pauvreté.

L’inclusion financière peut également autonomiser les travailleurs agricoles. Les agriculteurs qui ont accès aux services financiers produisent souvent des récoltes plus abondantes. Cela se traduit par des progrès sur l’ODD 2 : Faim zéro. Par exemple, lorsque les agriculteurs du Malawi ont déposé directement leurs revenus sur un nouveau compte bancaire, leurs dépenses pour l’équipement ont augmenté d’environ 13 % et la valeur de la production agricole de 21 % en moyenne.

L’inclusion financière protège la santé en donnant aux gens la possibilité de gérer leurs frais médicaux, ce qui répond à l’ODD 3 : Bonne santé et bien-être. Les produits d’épargne peuvent également permettre aux familles de planifier et de gérer les dépenses d’éducation, ce qui correspond à l’ODD 4 : Éducation de qualité.

En outre, dans les pays en développement, les femmes sont plus susceptibles que les hommes de travailler à leur compte et ont davantage besoin d’accéder aux services financiers formels. Les produits et services financiers appropriés (tels que les bureaux de crédit pour l’accès au crédit, les systèmes de paiement rapide par téléphone mobile, etc.) peuvent être utilisés pour promouvoir l’ODD 5 : Égalité entre les sexes.

Si l’on considère le cas de l’Afrique du Sud où l’indice d’inégalité de Gini est de 0,63 et où le taux de chômage s’élève à 29 %, la plupart des personnes à revenus moyens et faibles ont plus de quatre personnes à charge. Elles ont donc le devoir de souscrire une assurance médicale et funéraire non seulement pour elles-mêmes, mais aussi pour ces autres personnes. Ces régimes d’assurance sont généralement inadaptés : comme les courtiers d’assurance traditionnels se soucient davantage de la commission qu’ils perçoivent par plan d’assurance vendu, ils sur-assurent les clients au lieu de leur offrir une couverture adaptée à leurs besoins spécifiques.

En outre, à cause des prélèvements mensuels effectués pour payer les primes d’assurance, les personnes à faibles et moyens revenus n’ont plus guère de moyens pour couvrir leurs besoins essentiels. C’est pourquoi ils se précipitent vers les banques pour obtenir de petits (micro) prêts. Et comme les banques les considèrent comme des prêteurs à haut risque, ils doivent payer des taux d’intérêt élevés.

Par exemple, un microprêteur peut exiger jusqu’à R1500 en échange d’un prêt d’un mois d’une valeur de R1000. Ainsi, chaque mois, la personne à faible revenu « A » accumule plus de crédits afin de couvrir à la fois les engagements de primes d’assurance et le prêt à coût élevé du microprêteur. Non seulement ce cycle met le ménage à rude épreuve, mais il fait également monter le niveau de consommation et les inégalités de bien-être en Afrique du Sud.

Quelle est la place de l’épargne et de l’investissement dans un tel environnement ? Quelle est la place de la culture et de l’activité entrepreneuriales ? Les gens sont tellement dépassés par les remboursements de prêts auxquels ils doivent faire face chaque mois qu’ils ne pensent qu’à trouver un moyen d’obtenir un crédit supplémentaire. Cette inégalité dans l’offre de microfinance est un frein à la croissance économique et au développement.

En outre, la recherche insiste sur l’augmentation de la numérisation dans les services financiers. Une étude séparée encourage de nouvelles recherches afin d’explorer les questions importantes liées aux services de microfinance et d’ouvrir la discussion et le débat entre les chercheurs, les dirigeants des institutions de microfinance et les décideurs publics.

Selon les auteurs, les technologies de l’information et de la communication (TIC) sont un moteur important pour renforcer le secteur de la microfinance. À la lumière de la quatrième révolution industrielle, les TIC et les services financiers numériques peuvent faire progresser les ODD. Par exemple, la technologie peut soutenir les entreprises dirigées par des femmes en réduisant les risques de vol ainsi que les coûts administratifs.

Autre exemple, la façon dont les organismes d’aide au développement commencent à utiliser les services financiers numériques pour verser de l’argent aux survivants d’une catastrophe. Par conséquent, les futures recherches sur le rôle et l’impact des TIC dans le secteur de la microfinance – avec une attention particulière portée aux acteurs du secteur et à la chaîne de valeur des services microfinanciers fournis aux pauvres et aux personnes vulnérables – pourraient contribuer de manière importante au développement.

L’impact de la numérisation dans la finance se fait déjà sentir. Par exemple, plus de 30 pays disposent de modèles PAYGO, qui fournissent un service énergétique hors réseau en échange de paiements continus.

Angaza Design (au Kenya et en Tanzanie) et Divi Power (au Ghana, au Kenya, en Namibie, au Pérou et au Somaliland) sont deux sociétés ayant développé des lampes solaires portables que les consommateurs hors réseau peuvent payer sur une période de trois à douze mois grâce à une combinaison de financement : sur point de vente, par paiements mobiles et PAYGO. Ce type de financement innovant s’aligne sur la promotion de l’accès aux infrastructures : Eau propre et assainissement (ODD 6) et Énergie propre et d’un coût abordable (ODD 7).

Il ne fait aucun doute que la recherche sur l’inclusion financière peut fournir aux personnes les moyens d’améliorer leur vie. Elle encourage le travail décent et la croissance économique (ODD 8) via un accès facile au crédit et à d’autres services financiers qui facilitent l’investissement. La Société financière internationale estime qu’il existe entre 360 et 440 millions de micro, moyennes et petites entreprises formelles et informelles dans le monde, qui pourraient être soutenues financièrement pour soutenir l’innovation et l’industrialisation durable (ODD 9 : Industrie, innovation et infrastructure).

Dans un pays comme l’Afrique du Sud, la lutte contre les inégalités par l’inclusion financière vise les troubles politiques et la criminalité (ODD 10 – Inégalités réduites – et ODD 16 – Paix, justice et institutions efficaces). Les prestataires de microcrédits, qu’il s’agisse d’institutions de microfinance à but non lucratif ou de banques à but lucratif, fournissent des services financiers essentiels pour promouvoir le développement économique dans les pays en développement.

Mais le microcrédit ne s’est pas révélé être le moteur d’innovation qu’il devrait être. L’accès à des produits et services financiers adaptés aux besoins spécifiques des bénéficiaires, tels que les comptes de dépôt et d’épargne, les services de paiement, les prêts et les assurances, peut se traduire par des progrès en matière de consommation, de bien-être et d’activité économique générale.

Pour atteindre les ODD, il faudra des systèmes et des structures permettant aux individus de jouer leur rôle dans la résolution des problèmes de durabilité à tous les niveaux – de la femme qui exploite une petite exploitation agricole biologique au chauffeur de minibus-taxi qui veut alimenter son véhicule en énergie renouvelable, en passant par le jeune artiste de la campagne sud-africaine en attente de financement de démarrage pour lancer sa petite entreprise. Il existe un lien évident entre l’inclusion financière et le développement durable.

Sur le continent africain en particulier, où les défis sont plus nuancés et varient d’une région à l’autre, l’utilisation de solutions innovantes pour la microfinance permettant de créer des instruments et des produits financiers pertinents et adaptés peut déboucher sur des progrès significatifs et durables.

De plus, la numérisation des paiements pourrait faire entrer pour la première fois des millions d’adultes dans le système financier et renforcer l’infrastructure financière numérique dans les économies émergentes. Il est certain qu’une recherche ciblée visant à faciliter l’accès au financement pour les personnes, même aux niveaux de revenus les plus bas, est essentielle à la réalisation des ODD.

 

Sibahle Siphokazi Magadla
Labor economics professional