La recherche scientifique devrait être perçue comme une plus-value pour les sociétés démocratiques, comme un vecteur de développement social et économique et un moteur du progrès humain. Pourtant, la rationalité scientifique et l’humanisme progressiste sont de plus en plus la cible des critiques. Écrit par les rédacteurs fondateurs de GlobalDev, le présent article rappelle l’importance, pour le développement international, du type de connaissances que les chercheurs produisent. Alors que ce blog entre dans sa troisième année d’existence, GlobalDev entend élargir son champ d’activité, notamment en explorant de nouvelles façons de donner de la visibilité à la jeunesse et aux jeunes chercheurs provenant de pays en développement dans les débats politiques de premier plan.
Tandis que des gouvernements populistes se font élire et réélire dans le monde entier, y compris dans des pays riches et qui se portent bien, la multiplication des critiques à grande échelle à l’encontre de la rationalité scientifique et de l’humanisme progressiste est de plus en plus préoccupantes. La qualité du débat démocratique pâtit de la perte de confiance du public envers la recherche scientifique. L’enjeu actuel est de faire comprendre que la recherche est une plus-value pour les sociétés démocratiques, un vecteur de développement social et économique et un moteur du progrès humain.
Ce débat est une excellente piqûre de rappel pour la communauté scientifique concernant son rôle public ainsi que celui des connaissances spécifiques que les chercheurs produisent. Pendant des siècles, l’autorité scientifique a contribué au développement des sociétés modernes. Au fil des générations, nos sociétés ont accordé de l’importance aux efforts déployés pour produire, à travers une curiosité et des questionnements systématiques, des connaissances sur la nature ou les sphères sociales et politiques.
Ce débat est non seulement pertinent pour les pays extrêmement développés qui sont confrontés aux différents défis sociaux et environnementaux du développement durable, mais également pour les pays en développement. En effet, dans ces derniers, les profondes aspirations à un avenir meilleur donnent espoir à une population de jeunes florissante, et ce malgré le défi sans précédent de « ne laisser personne en marge » et de préserver les ressources naturelles durant le processus de développement. Ces défis sont vécus à la fois par les pays développés et les pays en développement. Ils disposent de peu d’expériences sur lesquelles capitaliser et ont beaucoup à apprendre.
Nous avons lancé GlobalDev il y a deux ans, en février 2018. Dans notre tout premier éditorial, nous revendiquions des solutions créatives pour éliminer une incompatibilité fondamentale entre l’hyperspécialisation des universités et le nouvel impératif de démonstration d’impact social, aujourd’hui une valeur centrale des universités et des bailleurs de fonds pour la recherche. Dans les pays du Nord et du Sud, les chercheurs actuels doivent répondre à cette question : pourquoi et pour qui est-ce que je fais mes recherches ?
GlobalDev a pour vocation d’être une plateforme de partage des connaissances sur le développement, issues de travaux de recherche de grande qualité, dans un format – l’article de blog – accessible au plus grand nombre. Le processus éditorial de GlobalDev réaffirme cette volonté. Nous accompagnons chacun de nos auteurs dans la préparation de son article avec la même rigueur et avec un grand investissement de temps et de compétences éditoriales. Notre expérience nous a appris que la traduction de la recherche en connaissances concrètes – et l’incitation de la recherche à prendre comme point de départ un défi politique plutôt qu’un problème de recherche – n’ont rien de naturel et sont loin d’un simple travail de « conversion ».
En octobre 2018, un débat organisé par la Bill and Melinda Gates Foundation à Washington D.C. avec six grands bailleurs du développement international a confirmé la pertinence et les promesses de notre approche. Cela nous a convaincus que GlobalDev devait être une caisse de résonnance pour les chercheurs des pays en développement et une plateforme qui leur permette d’interagir avec leurs pairs des pays du Nord dans un vocabulaire précis, mais simple.
Nous avons déjà publié plus de 100 articles de chercheurs dans de nombreuses disciplines des sciences sociales. De plus, nous continuons à proposer l’intégralité de nos contenus en trois langues, une démarche rare dans un monde qui considère (souvent à tort) l’anglais comme un acquis.
Ces deux dernières années ont été extrêmement positives pour nous. Le nombre d’auteurs provenant d’un institut du Sud ou d’un pays du Sud sur notre plateforme a triplé. Ces auteurs représentent aujourd’hui un tiers de l’ensemble de nos contenus, mais nous visons encore plus haut. De plus, nous recevons désormais plusieurs propositions d’articles spontanées chaque semaine. Par ailleurs, nos auteurs sont extrêmement satisfaits de notre processus éditorial et disent être stimulés par la rapidité et la qualité de nos commentaires éditoriaux.
En 2019, nous avons élaboré une approche thématique qui continuera à dynamiser notre blog. Par exemple, nous accordons une attention particulière aux questions de santé mentale et de mobilité sociale. De plus, en collaboration avec notre partenaire Results for All, nous déployons des efforts importants pour collecter le précieux point de vue de personnes externes au monde de la recherche concernant l’application de la recherche.
Nous ciblons également les jeunes chercheurs en leur demandant d’exposer ce que la recherche pour le développement signifie pour eux. Leurs réponses sont publiées chaque mercredi depuis février 2020 et pendant 10 semaines. Le travail de ces jeunes auteurs a été reconnu et récompensé lors de la conférence internationale sur le développement qui s’est tenue à Bonn fin octobre 2019. Nous espérons que beaucoup d’autres suivront leur exemple.
À l’aube de notre troisième année d’existence, nous avons décidé de donner encore davantage de visibilité aux jeunes. GlobalDev aspire à être une plateforme où la recherche se convertit en connaissances. Cette ambition requiert d’ancrer les faits scientifiques dans le débat public afin qu’un grand nombre de parties prenantes se les approprient. Pour cela, les jeunes ont un rôle déterminant à jouer.
Nous explorons de nouvelles façons de donner de la visibilité aux jeunes des pays en développement, évidemment des jeunes chercheurs, mais également des personnes extérieures au monde de la recherche dans un espace de débat. Notre processus éditorial et nos normes de publication ne changeront pas : nous resterons attachés à la même rigueur et au format qui caractérisent notre blog indépendamment de l’auteur.
Toutefois, grâce à nos contenus, nous cherchons des moyens d’inciter les jeunes à prendre en compte, autant que possible, les arguments de la recherche académique pour forger leurs perceptions et opinions concernant les questions de développement. Nous sommes convaincus que cela pourrait permettre de multiplier les opportunités et de créer des espaces de liaison entre la recherche et la sphère politique, aussi bien en ligne que dans les espaces physiques.
Les étudiants et les jeunes chercheurs sont la prochaine génération de professionnels du développement, de décideurs et de chercheurs. Mais ils sont également les premiers à ressentir les progrès (ou les régressions) provoqués par le développement, et ce dans leurs propres vies. Nous pensons qu’ils méritent leur propre espace d’expression, et cela commence sur notre plateforme et celles de nos partenaires. Nous travaillons actuellement sur des initiatives ciblant les jeunes. Nous serons ravis de recevoir un message de la part de toute personne souhaitant nous aider dans cette mission, que ce soit en tant que bailleur de fonds, partenaire ou ami critique. Et cela va sans dire, continuez à écrire pour nous !
Les rédacteurs fondateurs
